Politique
RD Congo : Signature d’un accord de paix avec le Rwanda le 27 juin à Washington
La République démocratique du Congo et le Rwanda s’apprêtent à signer un « accord de paix » visant à mettre fin aux hostilités dans l’est instable de la RDC.
L’annonce a été faite dans un communiqué conjoint publié mercredi 18 juin par les États-Unis, la RDC et le Rwanda, après plusieurs jours de pourparlers de paix à Washington.
« Les équipes techniques de la République démocratique du Congo et de la République du Rwanda ont paraphé le texte de l’accord de paix, en présence de la sous-secrétaire américaine aux Affaires politiques, Allison Hooker », indique le communiqué.
Il précise que les deux pays signeront l’accord final à Washington le 27 juin, en présence du secrétaire d’État américain Marco Rubio.
Les efforts visant à promouvoir la paix et la stabilité dans la région des Grands Lacs seront également discutés lors d’un prochain sommet des chefs d’État à Washington, ajoute le communiqué.
Les discussions font suite à des années de combats dans l’est de la RDC, qui ont pris de l’ampleur cette année lorsque le groupe M23, soutenu par le Rwanda, a pris le contrôle de vastes étendues de territoire, y compris les grandes villes de Goma et Bukavu.
« Une « intégration conditionnelle » fondée uniquement sur le programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS), qui reflète notre position sur le respect du processus de Nairobi », a écrit aujourd’hui le porte-parole du président Félix Tshisekedi, dans un message publié sur X [anciennement Twitter].
Allison M. Hooker, sous-secrétaire d’État aux affaires politiques, et Massad Boulos, conseiller principal des États-Unis pour l’Afrique, ont mené ces pourparlers qui ont duré trois jours avec des experts de la RDC et du Rwanda.
La prochaine étape annoncée par le porte-parole du secrétaire d’État américain est la signature ministérielle de l’accord de paix à Washington le 27 juin, suivie de sa mise en œuvre dans les meilleurs délais.
Si tout se passe comme prévu, les ministres de la RDC et du Rwanda signeront la semaine prochaine, un accord de paix élaboré sous la houlette des États-Unis et du Qatar, a déclaré le secrétaire d’État américain.
Que contient ce projet d’accord ?
Les grandes lignes de l’accord, en cours de finalisation, comportent plusieurs volets :
- Sécuritaire : retrait préalable des troupes rwandaises de RDC, cessez-le-feu global, vérifié par un Mécanisme conjoint de sécurité adossé à l’ONU, engagement mutuel à ne plus soutenir de groupes armés (M23, FDLR…).
- Politique : désarmement progressif et intégration conditionnelle du M23 dans un dialogue national congolais.
- Humanitaire : protection des civils, retour sécurisé des réfugiés, ouverture de couloirs humanitaires sous la supervision des agences onusiennes.
- Institutionnel : création d’un mécanisme conjoint de sécurité, appuyé par des observateurs internationaux, pour surveiller la frontière et coordonner les opérations de paix, rapports publics trimestriels.
- Économique : relance des investissements dans les infrastructures, les ressources minières (cuivre, cobalt, lithium) et la réforme du secteur sécuritaire congolais, réhabilitation de la RN2 et de l’axe Goma–Bukavu. Les États-Unis, via la DFC (U.S. Development Finance Corporation), envisagent un programme d’investissements conditionnés à la stabilité.

Le conflit qui dure depuis des décennies s’est intensifié plus tôt cette année lorsque les rebelles du M23 ont pris le contrôle de vastes étendues de territoire riche en minéraux dans l’est de la RDC.
Le Rwanda nie soutenir le M23, insistant sur le fait que sa présence militaire dans la région est une mesure défensive contre les menaces posées par des groupes armés comme les FDLR – un groupe rebelle composé en grande partie de Hutus ethniques liés au génocide rwandais de 1994.
Le Rwanda accuse à son tour le gouvernement congolais de soutenir les FDLR, ce que nie la RDC.
Le M23 a pris Goma fin janvier, puis la ville de Bukavu, et a depuis mis en place des structures de gouvernance dans les régions sous son contrôle.
Des milliers de personnes ont été tuées et des centaines de milliers de civils ont été contraints de quitter leurs foyers ces derniers mois à la suite de l’offensive rebelle.
Les questions auxquelles le projet d’accord n’a pas encore répondu sont les suivantes :
- Le groupe rebelle M23 va-t-il se retirer des zones qu’il occupe ?
- Le « respect de l’intégrité territoriale » signifie-t-il que le Rwanda admet avoir des troupes dans l’est de la RDC et qu’il les retirera ?
- Le « retour des réfugiés » convenu permettrait-il à des milliers de Congolais de revenir du Rwanda ?
- Le « désarmement » signifie-t-il que le M23 va désormais déposer les armes ?
- Qui désarmera les FDLR, après l’échec de plusieurs tentatives précédentes ?
- L’accès humanitaire convenu permettrait-il la réouverture de l’aéroport de Goma pour l’acheminement de l’aide ?

Une médiation stratégique des États-Unis
Suite à la perte de territoires, le gouvernement de Kinshasa s’est tourné vers les États-Unis pour obtenir de l’aide, leur offrant apparemment l’accès à des minéraux essentiels. L’est de la RDC est riche en coltan et autres ressources vitales pour l’industrie électronique mondiale.
Les États-Unis ont décidé de s’impliquer dans le dossier, avec une diplomatie offensive. A la mi-avril, Washington a réuni les deux parties autour d’une déclaration de principes.
Depuis, les discussions ont été intensifiées sous l’égide du Département d’État et d’émissaires comme Marco Rubio et Massad Boulos, avec l’appui du Qatar, de l’Union africaine et de l’Angola.
L’objectif affiché : un « paquet sécurité-développement » où cessez-le-feu, désarmement et investissements forment un tout indissociable.
Derrière cette volonté de paix, se profile aussi une lutte d’influence géopolitique. Washington, en perte de vitesse face à la Chine dans le secteur minier africain, veut sécuriser des filières d’approvisionnement en minerais critiques. Pour cela, la stabilité régionale est une priorité.
Quelles sont les chances de succès?
Les accords de paix entre les deux pays ont échoué dans le passé.
L’année dernière, des experts rwandais et congolais sont parvenus à deux reprises à un accord, sous la médiation angolaise, sur le retrait des troupes rwandaises et des opérations conjointes contre les FDLR. Cependant, les ministres des deux pays n’ont pas approuvé l’accord. L’Angola a finalement démissionné de son rôle de médiateur en mars.
Le nouvel accord de paix engage les deux pays au respect de l’intégrité territoriale et à la cessation des hostilités. Bien que sa signature soit prévue rapidement, l’impact de cet accord sur le contrôle des territoires occupés par le M23 dans l’est de la RDC constitue la principale inconnue.
Si la signature du 27 juin se confirme, ce sera une avancée diplomatique majeure. Mais ce ne sera qu’un début. La mise en œuvre de l’accord, le retrait effectif des troupes, le désarmement des groupes rebelles et l’inclusion des populations locales dans le processus décideront du succès – ou de l’échec – de cette initiative.
Dans une région où la paix est souvent de courte durée, ce projet est peut-être l’une des dernières fenêtres d’opportunité pour sortir du cycle de la violence.

Entre espoirs et écueils
L’annonce d’un possible accord est accueillie avec prudence par les analystes.
« On a vu trop de cessez-le-feu violés, trop d’engagements non tenus. Ce qui fait la différence aujourd’hui, c’est l’engagement des États-Unis. Mais cela ne garantit pas l’application sur le terrain », explique à la BBC Mvemba Phezo Dizolele, enseignant-chercheur congolais à la Johns Hopkins School of Advanced International Studies, aux États-Unis.
Les critiques pointent aussi l’absence de mécanismes robustes de justice transitionnelle, de reconnaissance des crimes passés, et de protection des communautés affectées.
Pour lui, l’initiative américaine est « historique », mais ne saurait masquer les failles profondes du processus.
« L’importance de cet accord ne saurait être sous-estimée. Cela fait plus de trente ans que la RDC et le Rwanda sont en conflit. Aujourd’hui, le fait que les États-Unis s’impliquent pour tenter de conclure un accord de paix – et non plus seulement sur le plan humanitaire – est un tournant majeur », explique-t-il.
Le conflit qui déchire la région des Grands Lacs ne se résume pas aux seules richesses minières. Il s’inscrit dans un enchevêtrement complexe de tensions identitaires, de conflits de légitimité, de revendications territoriales (souvent qualifiées d’irredentistes) et de luttes pour l’influence régionale.
Sur le terrain, les groupes armés sont pour la plupart d’origine congolaise, malgré les appuis extérieurs. Et côté rwandais, la tentation de maintenir une emprise sur des zones riches de RDC est dénoncée. « Kigali considère ces territoires comme des zones d’intérêt stratégique, mais ce n’est pas un droit », rappelle l’expert.
La logique du statu quo militaire, sous prétexte de traquer les rebelles des FDLR, alimente la méfiance.
Pour Dizolele, la logique actuelle du projet repose sur une base erronée : l’idée que la paix pourrait être obtenue par le partage ou l’exploitation conjointe des ressources naturelles, notamment les minéraux critiques du Kivu.
« C’est une erreur fondamentale. On ne fait pas la paix à cause des ressources naturelles. Les causes profondes du conflit sont ailleurs : elles relèvent de la citoyenneté, des droits, de l’identité, de l’hégémonie régionale et même de revendications territoriales injustifiées », tranche-t-il.
L’enseignant s’inquiète également des risques de promesses irréalistes.
Politique
Sénégal : Ousmane Sonko sonne la mobilisation générale au sein de PASTEF
Le président du parti PASTEF – Les Patriotes, Ousmane Sonko, a appelé lundi l’ensemble des structures de sa formation politique à s’engager dans une dynamique de mobilisation politique, sociale et citoyenne accrue, dans un contexte de transformation nationale en cours, selon un communiqué officiel.
Dans cette instruction interne adressée aux cellules, sections communales, coordinations départementales et élues à l’étranger, ainsi qu’aux cadres et militants du parti, M. Sonko souligne que le grand rassemblement du 8 novembre 2025 a mis en évidence l’attachement du peuple sénégalais au projet politique porté par PASTEF.
Le document, daté du 15 décembre 2025, fixe plusieurs objectifs stratégiques à atteindre d’ici à la fin 2026, notamment la massification du parti avec l’objectif d’identifier et d’activer un million de militants, la création ou la redynamisation de 10 000 cellules fonctionnelles couvrant le territoire national et la diaspora, ainsi que la structuration de proximité pour renforcer l’ancrage citoyen du mouvement.
Selon l’instruction, les cellules devront devenir des « centres d’éducation politique et de vulgarisation », des espaces d’expression citoyenne et des lieux d’actions sociales, tout en assurant une présence régulière auprès des populations.
Des campagnes d’adhésion, la tenue de réunions statutaires et l’élaboration de plans d’actions réguliers sont également prévues pour renforcer la cohésion interne.
Ousmane Sonko insiste sur le rôle du PASTEF non seulement comme parti politique, mais comme « dynamique sociale, populaire et citoyenne », engageant chaque responsable et militant à s’approprier pleinement la démarche pour garantir son impact sur le terrain et sa durabilité.
Le Secrétariat général du parti a été chargé de veiller à l’application effective de cette instruction, qui s’inscrit selon les dirigeants dans la continuité de la transformation politique et sociale engagée au Sénégal depuis l’arrivée de PASTEF au pouvoir.
Source : https://www.ndarinfo.com/Ousmane-Sonko-sonne-la-mobilisation-generale-au-sein-de-PASTEF_a42147.html
Politique
Bénin : Le coup d’État qui dit tout haut ce que la région murmure
La tentative de renversement à Cotonou n’est pas qu’un accident interne. Elle s’inscrit dans une dynamique plus large : la projection d’influence du Sahel vers les États côtiers, sur fond de rupture politique avec la CEDEAO, de corridors convoités et de guerre des récits.
Le dimanche où tout a vacillé
Cotonou dort encore lorsque les premiers coups de feu claquent. Le 7 décembre 2025, à 4h30 du matin, les hommes du lieutenant-colonel Pascal Tigri, franchissent les grilles de la télévision nationale. Dans les quartiers populaires, personne ne comprend immédiatement ce qui se joue. Mais ceux qui connaissent la grammaire des putschs africains savent que le choix de Tigri n’est pas anodin. Commandant des forces spéciales rattachées à la Garde nationale, l’officier n’est pas de ceux qu’on envoie mater une mutinerie de garnison. C’est un scalpel, pas un marteau – l’instrument des coups pensés pour décapiter un régime avant que quiconque n’ait le temps de réagir.
Ce qui frappe, c’est la simultanéité des événements. Alors que les tirs résonnent encore à Cotonou, le Béninois Kemi Seba – conseiller du général Tiani à Niamey et figure du panafricanisme pro-AES – annonce déjà la chute de Patrice Talon sur les réseaux sociaux. Trop tôt. Beaucoup trop tôt. Cette précipitation en dit long : soit l’homme savait, soit il avait reçu des consignes d’amplification bien avant l’issue. L’objectif était limpide – créer un fait accompli médiatique, provoquer des ralliements opportunistes, imposer le récit d’un soulèvement populaire contre un « dictateur pro-français ».
L’intervention nigériane va tout casser, appuyée au sol par les Forces spéciales françaises au Bénin depuis une année et demie pour la création et la formation des Forces spéciales du Bénin. Frappes aériennes, feu vert du Sénat pour un déploiement terrestre. En quelques heures, la tentative s’effondre. Mais pour ceux qui observent la région depuis des années, l’épisode a révélé bien plus qu’un coup raté : une mécanique de projection qui dépasse largement les frontières béninoises.

La piste sahélienne
Que s’est-il vraiment passé dans les semaines précédant le 7 décembre ? Les éléments qui filtrent dessinent un scénario de facilitation extérieure plutôt que de commandement direct. Des sources proches de l’enquête évoquent des contacts entre certains putschistes et des intermédiaires nigériens – des rencontres discrètes, un soutien logistique et financier. Le profil de Tigri lui-même interroge : un officier des forces spéciales, rompu aux techniques de prise d’objectifs critiques, ne se lance pas dans une telle aventure sur un coup de tête.
L’Alliance des États du Sahel n’a pas nécessairement tiré les ficelles dans les moindres détails. Mais elle a patiemment construit l’écosystème qui rend ce genre d’opération possible : un narratif de délégitimation du régime Talon martelé depuis des mois, des réseaux d’influence travaillant l’opinion béninoise sur les réseaux sociaux, des relais sanctuarisés au Niger. Les suites judiciaires confirment cette lecture. Un juge d’instruction de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) a lancé deux mandats d’arrêt internationaux contre Kemi Seba et Sabi Sina Korogoné, figure de l’opposition béninoise. Il leur est reproché d’être de connivence avec les mutins – formulation qui dessine une architecture de complicités où se rejoignent l’écosystème panafricaniste pro-AES, des relais politiques intérieurs et les exécutants en treillis.
C’est là toute la subtilité de la méthode – et Moscou procède de façon identique en Afrique subsaharienne : façonner les environnements plutôt que commander directement, de sorte que les acteurs locaux agissent dans le sens voulu en croyant servir leurs propres intérêts.
Le calcul est simple. Si le coup réussit, l’AES gagne un allié côtier et achève d’encercler ce qui reste des positions françaises. S’il échoue, elle ne paie aucun prix – pas de pertes, pas d’empreinte compromettante – tout en ayant testé les défenses adverses et repéré leurs failles pour la prochaine tentative.
Pourquoi le Bénin
Pour comprendre l’acharnement, il faut regarder une carte – et un tuyau. Le pipeline reliant le champ pétrolier d’Agadem au terminal de Sèmè-Kpodji n’est pas une infrastructure parmi d’autres. Pour Niamey, c’est une artère vitale, le seul passage pour transformer le brut nigérien en devises. Depuis juillet 2023, le Niger du général Tiani s’est engagé dans une stratégie de « continentalisation » – rupture avec Paris, rapprochement avec Moscou, alliance avec les juntes voisines. Mais cette émancipation proclamée bute sur une réalité têtue : le Niger reste enclavé, et ses ressources ne valent rien sans accès à la mer.
Voilà le nœud du problème. S’affranchir de l’Occident tout en dépendant de ports contrôlés par des États alignés sur la CEDEAO, c’est construire sur du sable. D’où la tentation d’une sécurisation préemptive : plutôt qu’attendre qu’un Bénin hostile ferme les vannes, installer à Cotonou un régime ami.

Le Bénin offre par ailleurs un terreau favorable. Au nord, la menace jihadiste n’est plus une abstraction. Des katibas venues du Burkina Faso franchissent régulièrement la frontière, le parc W est devenu un sanctuaire. Cette réalité nourrit des frustrations dans l’armée béninoise : soldats envoyés au front sans grande logistique, officiers oubliés dans les promotions. Ces griefs corporatistes sont du pain béni pour qui veut retourner une garnison.
Le rôle des voisins
La géographie commande. Entre le Niger et le Bénin, la frontière n’existe que sur les cartes. Dans les faits, c’est un espace poreux où circulent marchands, contrebandiers, bergers transhumants – et, à l’occasion, des émissaires plus discrets. Les services de renseignement béninois ne peuvent pas surveiller chaque piste, chaque marché frontalier, chaque conciliabule nocturne. Cette porosité est une aubaine pour qui veut préparer un coup sans laisser de traces.
Le Togo voisin joue un jeu trouble. Le régime Gnassingbé, autoritaire, a toujours su louvoyer entre les camps. Sans rejoindre l’AES, Lomé maintient des canaux ouverts avec les juntes sahéliennes et se garde bien de les condamner trop fort. Cette ambivalence crée une zone grise commode – un espace où des contacts peuvent se nouer, où des intermédiaires peuvent opérer sans être inquiétés.
L’incident du C-130 nigérian contraint d’atterrir au Burkina Faso au lendemain du putsch manqué donne la mesure des tensions. Ouagadougou a immédiatement crié à la provocation hostile. On est loin des déclarations de bon voisinage. La CEDEAO, jadis forum de régulation des crises, est devenue elle-même l’enjeu du conflit. Quand le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont annoncé leur retrait en janvier 2024, ils ont consommé une sécession institutionnelle sans précédent depuis les indépendances. L’Afrique de l’Ouest n’est plus une région ; c’est un champ de bataille.

Ce qui vient…
Le putsch a échoué, mais l’ambition qu’il révèle ne s’évanouira pas. L’AES peut choisir l’usure : multiplier les tentatives, forcer Abuja et Paris à intervenir encore et encore, créer une instabilité chronique qui finira par épuiser les défenseurs. Elle peut aussi contourner l’obstacle en visant des proies plus faciles – le Togo des Gnassingbé, régime sans légitimité populaire, ou le Ghana, démocratie fragilisée par la crise économique.
Pour la France, l’enjeu dépasse le Bénin. Après les humiliations du Mali, du Burkina Faso et du Niger, Cotonou est l’un des derniers points d’ancrage en Afrique de l’Ouest francophone. Paris a activé ses réseaux le 7 décembre, partagé ses informations avec le Nigeria. Mais cette victoire tactique masque un piège : plus la France soutient Talon, plus elle le désigne comme « l’homme de Paris » – un label devenu toxique.
Le Nigeria reste la clef. Sans Abuja, le putsch aurait probablement réussi. Mais le géant ouest-africain ploie sous ses propres fardeaux : Boko Haram, criminalité endémique, naira en chute libre. Combien de temps pourra-t-il jouer les gendarmes régionaux ?
Le scénario le plus probable est l’escalade contrôlée : une succession de crises, chacune repoussée au prix d’efforts croissants, dans une guerre d’usure où l’AES mise sur la lassitude de ses adversaires. L’histoire enseigne que, dans ce type de confrontation, l’attaquant choisit le moment et le lieu ; il lui suffit de réussir une fois.
Ce qui s’est joué à Cotonou n’est pas une affaire béninoise. C’est la première bataille d’une guerre pour le contrôle des littoraux – et la confirmation d’une vérité vieille comme le monde : qui tient les ports tient la respiration des terres enclavées. Le golfe de Guinée est devenu la nouvelle ligne de front.
Source : https://www.revueconflits.com/benin-le-coup-detat-qui-dit-tout-haut-ce-que-la-region-murmure/
Politique
Guinée-Bissau : La CEDEAO exige le retour rapide à un régime civil
À l’issue du sommet de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest tenu à Abuja dimanche, au Nigeria, le bloc régional a rejeté le programme de transition des militaires de la Guinée-Bissau et exigé un retour rapide à l’ordre civil.
La CEDEAO menace d’imposer des sanctions ciblées à tous ceux qui entraveraient le processus démocratique. Julius Maada Bio, Président de la Sierra Leone et Président de la CEDEAO a critiqué cette régression démocratique : les architectes de la CEDEAO ont compris que la démocratie est inséparable de la paix, de la justice et du développement. Aujourd’hui, cet ordre démocratique est mis à l’épreuve. La résurgence des changements anticonstitutionnels de gouvernement menace notre stabilité régionale, sape les droits de nos citoyens et affaiblit notre avenir collectif. L’instabilité en Guinée-Bissau et la tentative de coup d’État au Bénin nous rappellent que la démocratie exige une vigilance constante et une action fondée sur des principes.
La CEDEAO avait déjà été secouée par une série de coups d’Etat entre 2020 et 2023 au Burkina Faso, en Guinée, au Mali et au Niger, pays toujours dirigés par des militaires. L’organisation a qualifié de progrès significatif le processus de transition en cours à Conakry. Le vice-président du Nigeria, Kashim Shettima a lui rappelé la nécessité d’une unité de ce bloc avec les dissensions des pays de l’AES.
L’Afrique de l’Ouest n’est pas un assemblage aléatoire de frontières tracées au hasard. C’est une famille liée par la mémoire, la culture, la lutte et les aspirations. Comme dans toutes les familles, nous sommes en désaccord, nous contestons les idées et nous mettons à l’épreuve la patience des uns et des autres. Mais le désaccord n’efface pas l’appartenance. Les rivalités civiles n’annulent pas le sang partagé. Telle est la position du Nigeria. Nous restons persuadés que c’est la fraternité, et non la force, qui doit définir l’avenir de notre communauté.
Vu de l’Afrique de l’ouest, la CEDEAO bien qu’étant l’une des rares organisations régionales actives est critiquée pour son inaction face à certains régimes qui se perpétuent au mépris de la Constitution ou des droits et des libertés populaires. Elle accusée de suivre un agenda politique dicté par l’occident en occurrence la France.