Politique
Cameroun : Paul Biya prête serment sur fond de tensions post-électorales
Au pouvoir depuis 43 ans dans ce pays d’Afrique centrale et doyen des chefs d’État dans le monde, le président a été réélu après un scrutin contesté qui a déclenché des manifestations violemment réprimées.
À 92 ans, le président du Cameroun Paul Biya, a prêté serment jeudi 6 novembre pour un huitième mandat, après une réélection contestée qui a déclenché des manifestations violemment réprimées. «Je ne ménagerai aucun effort pour continuer à être digne de cette confiance», a déclaré le président au cours d’une cérémonie à l’Assemblée nationale, devant des députés, figures politiques et en l’absence de dirigeants étrangers.

Ce doyen des chefs d’État dans le monde, au pouvoir depuis 43 ans dans ce pays d’Afrique centrale, Paul Biya, dont les apparitions publiques sont rares, sera investi pour un nouveau septennat au cours d’une cérémonie qui a commencé peu après 11 heures locales à l’Assemblée nationale à Yaoundé.

Le président Biya a été proclamé vainqueur de la présidentielle du 12 octobre avec 53,66% des voix selon les résultats officiels publiés par le Conseil constitutionnel. Mais Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre passé à l’opposition, qui a suscité un engouement inattendu chez les jeunes avides de changement, revendique également la victoire. «Il y a deux présidents désormais, le président élu par le peuple camerounais que je suis et le président nommé par le Conseil constitutionnel que vous connaissez», a clamé Issa Tchiroma Bakary sur ses réseaux sociaux mercredi.
Issa Tchiroma a appelé à plusieurs reprises ses partisans à défendre ce qu’il estime être sa victoire. Des manifestations sporadiques et limitées – quelques centaines de jeunes – dans plusieurs villes du Cameroun ont été réprimées dans le sang après l’annonce le 27 octobre de la réélection de Paul Biya. Le gouvernement a reconnu des «pertes en vies humaines» durant ces manifestations sans donner de bilan ou de détails de dates ou lieux.
Opérations «villes mortes»
L’opposant a depuis appelé à des opérations «villes mortes» de lundi à mercredi, un appel diversement suivi dans les grandes villes du Cameroun. Le mouvement a été largement suivi dans son fief de Garoua ou à Douala la capitale économique. À Yaoundé, en revanche, la plupart des commerces étaient ouverts, les enfants à l’école et les employés au travail.
La localisation actuelle de Issa Tchiroma est inconnue. Mardi un de ses porte-parole avait indiqué que celui-ci était «en mouvement». Le gouvernement a annoncé son intention d’engager des poursuites judiciaires contre l’opposant, dénonçant notamment ses «appels répétés à l’insurrection». «Aucun des deux camps n’étant disposé à céder, le risque de voir les troubles s’aggraver est élevé», s’est inquiété fin octobre l’International Crisis Group (ICG).
Dans son texte, le centre de réflexion relaie des incohérences dans les résultats officiels, mises en avant par l’opposition et des organisations de la société civile, et évoque lui-même des chiffres «étonnants». «Ce conflit risque de dégénérer dans un pays déjà secoué par une rébellion séparatiste dans ses régions anglophones», prévient ICG. L’Union européenne et l’Union Africaine ont déploré la violence de la répression des autorités. Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme a appelé à l’ouverture d’une enquête.
Politique
Bénin : L’Assemblée nationale adopte la création d’un Sénat
Dans la nuit du vendredi 14 au samedi 15 novembre 2025, l’Assemblée nationale béninoise a voté la création du Sénat. 90 députés ont approuvé la révision constitutionnelle et 19 ont voté contre.
Le texte ainsi adopté institue désormais au Bénin, un Parlement bicaméral comprenant l’Assemblée nationale et un Sénat. La nouvelle loi constitutionnelle précise que la nouvelle institution aura pour mission de « réguler la vie politique » de veiller à l’unité nationale, à la sécurité publique et à la paix.
D’après cette révision constitutionnelle, les lois désormais votées par l’Assemblée seront désormais transmises simultanément au président de la République et au Président du Sénat.
L’autre réforme introduite par cette révision constitutionnelle, la rallonge de la durée du mandat présidentiel qui passe de cinq à sept ans renouvelable une seule fois.
La disposition relative à cette modification ajoute que nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats de président de la République.
Les mandats des députés et des élus locaux passent également de cinq à sept ans renouvelable.
Après l’étape de l’Assemblée nationale, le président Patrice Talon va saisir la Cour Constitutionnelle pour un contrôle de constitutionnalité. La juridiction constitution devra approuver la réforme avant que le président ne promulgue pour l’entrée en vigueur de la nouvelle loi fondamentale du Bénin.
Cette modification constitutionnelle est l’initiative de deux députés de la coalition au pouvoir qui ont introduit la proposition de loi à l’Assemblée nationale depuis le 31 octobre 2025.
Politique
Sénégal : Le Premier ministre Ousmane Sonko et ses partisans en démonstration de force à Dakar
Ousmane Sonko, Premier ministre du Sénégal et président du parti PASTEF, a tenu samedi 8 novembre un meeting très attendu au stade Léopold-Sédar-Senghor, à Dakar. Plusieurs dizaines de milliers de personnes y participaient, dans un contexte de grogne sociale.
Le Premier ministre Ousmane Sonko a organisé ce samedi 8 novembre un rassemblement d’envergure, qualifié de « Terra meeting », véritable démonstration de force populaire. L’objectif était de marquer la force et l’unité de son parti, le PASTEF (Patriotes Africains du Sénégal pour le Travail, l’Éthique et la Fraternité), un peu plus de 18 mois après l’arrivée du parti au pouvoir.
Des centaines de bus ont afflué toute la journée au stade Léopold-Sédar-Senghor de Dakar pour l’événement, transportant une foule impressionnante de militants venus de tout le pays. Ces manifestants disent être venus par « soucis patriotes » et dans le but de réitérer leur soutien à Ousmane Sonko et à son projet de transformation du pays.
Le Sénégal est confronté à une situation économique préoccupante, avec un déficit budgétaire de près de 14 % du PIB et une dette du secteur public et parapublic estimée provisoirement à 132 % du PIB à la fin de 2024. Les autorités au pouvoir depuis 2024 accusent le précédent régime d’avoir dissimulé les vrais chiffres des indicateurs clés comme la dette publique et le déficit budgétaire. Le gouvernement a imposé ces dernières semaines des taxes sur des produits comme le tabac, l’alcool ou les jeux de hasard, ainsi que sur les transferts d’argent numériques très utilisés dans le pays.

« Certains espèrent une brouille entre Sonko et Diomaye »
Le gouvernement sénégalais fait face à de nombreuses critiques de la part de l’opposition et de certains observateurs. Un peu plus tôt samedi, un collectif regroupant des membres de l’opposition avait tenté de tenir une manifestation – interdite par les autorités – contre le gouvernement ailleurs de la capitale. Plusieurs personnes ont été arrêtées par les forces de l’ordre déployées en grand nombre sur les lieux, tandis que d’autres ont été dispersées à coups de gaz lacrymogènes.
Ousmane Sonko, populaire auprès des jeunes qui nourrissent beaucoup d’espoir envers les autorités issues de la présidentielle de mars 2024 et qui avaient promis « la rupture » et la justice sociale, a abordé plusieurs autres thèmes lors de ce grand meeting de plusieurs heures. Il a évoqué sa relation avec le président Bassirou Diomaye Faye, dont il fut le mentor, un sujet qui suscite des débats dans le pays. « Certains espèrent une brouille entre Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye », a-t-il lancé, « dans la vie tout peut arriver. Mais ce qui pourrait nous séparer ne viendra pas de moi et j’ai bonne foi que ça ne viendra pas non plus de lui ».
Il a également mis en garde, sans citer de noms, certains alliés au sein du gouvernement qui « tentent de manipuler et d’isoler » le président Faye pour l’opposer à lui. Le Premier ministre a par ailleurs appelé l’ancien président Macky Sall, installé au Maroc, à rentrer au Sénégal « s’il est courageux », l’accusant d’être coupable, lui et son régime, de « haute trahison ».
Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye ont promis de faire rendre des comptes aux précédents dirigeants qu’ils accusent d’agissements coupables dans la gestion des affaires, à commencer par l’ex-président Macky Sall. Plusieurs de ses anciens ministres ont déjà été inculpés pour des malversations présumées.
Politique
RD Congo : Signature du volet économique de l’accord de paix du 27 juin
Plus de quatre mois après la poignée de main historique, à Washington, entre les ministres des Affaires étrangères rwandais et congolais, la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda ont paraphé le texte intégral du cadre d’intégration économique régional, le volet économique de l’accord de paix du 27 juin. Cela s’est fait dans la nuit de vendredi à ce samedi 8 novembre, dans la capitale américaine, à l’issue de la quatrième réunion du comité conjoint de suivi de l’accord, une avancée significative, se réjouissent les deux médiateurs, le Qatar et les États-Unis.
Il faut dire que le texte était déjà prêt, depuis la fin du mois d’août. Les deux délégations étaient prêtes à signer, la première semaine d’octobre. Kinshasa avait refusé de signer, expliquant qu’il fallait d’abord avancer sur les aspects sécuritaires.
Vendredi 7 novembre, devant Allison Hooker, sous-secrétaire d’État américaine aux Affaires politiques, et Massad Boulos, conseiller spécial pour l’Afrique, les deux camps ont finalement paraphé le document. Le texte fixe les secteurs de coopération économique entre Kinshasa et Kigali, ainsi qu’avec Washington, dans une certaine mesure.
Le texte signé précise toutefois que la mise en œuvre de ce cadre d’intégration économique reste subordonnée à l’exécution satisfaisante du concept d’opérations (CONOPS) et de l’ordre opérationnel (OPORD) prévus par l’accord de paix, deux mécanismes censés neutraliser les FDLR et lever les mesures dites défensives du Rwanda.
Il s’agit ainsi d’une avancée sur le papier, mais pas vraiment sur le terrain. D’ailleurs, les deux parties reconnaissent la lenteur des progrès et se sont engagées à redoubler d’efforts pour appliquer l’accord de Washington. Elles se sont ainsi entendues sur des actions concrètes à court terme. Sur ce point, Kinshasa et Kigali ont notamment examiné les préparatifs des opérations militaires contre les FDLR et ont adopté un accord de mise en œuvre.
Sur le papier, cela ressemble à des avancées, mais c’est sur le terrain qu’il faut évaluer les vrais résultats, a confié à RFI un diplomate occidental qui suit ce processus de paix.
« Nous sommes sur le point de cueillir le fruit de la paix »
De son côté, le président congolais Félix Tshisekedi a annoncé la conclusion prochaine des processus de Doha et de Washington, deux cadres de négociations destinés à ramener la paix dans l’Est de la République démocratique du Congo. Depuis Belém où il participe au sommet climatique de la COP30, Félix Tshisekedi a précisé que la Maison-Blanche devait prochainement adresser l’invitation officielle pour la signature de l’accord de paix.
« Je suis heureux de vous annoncer que les pourparlers dont il est question à Washington et à Doha arrivent à leur terme. Dans les prochains jours, la Maison Blanche va nous adresser officiellement une invitation à clôturer ce processus de l’accord de paix. Mais attention, nous ne sommes pas naïfs. Ce n’est pas nous qui avons provoqué cette guerre. Beaucoup de pays voisins profitaient de notre pays et de notre économie. Nous nous sommes battus pour mettre fin à cela. Nous sommes à la fin. Nous sommes sur le point de cueillir le fruit de la paix, le fruit d’une paix durable en RDC », a affirmé en lingala le président congolais au micro de RFI.